La variante, « nous dans la famille, on est des timides » existe aussi. Cette croyance limitante est particulièrement efficace : elle permet de bien bien limiter son champ d’action dans toute la sphère sociale et de ne pas s’épanouir en toute quiétude.
Pourtant, il y a 3 paramètres qui peuvent nous aider à sortir un tant soit peu de cette croyance :
1) On n’est timide que par rapport aux autres.
Donc tout cela a quelque peu à voir avec la crainte de « qu’est-ce que les autres vont penser de moi ? » et l’autodénigrement qui va avec : « Ils vont sûrement s’apercevoir que je suis nul.le et moins bien qu’eux« . Par exemple.
2) C’est pas parce qu’on s’est défini timide depuis tout petit, à l’école, dans la sphère familiale, qu’on doit rester dans cette position.
Evidemment, on peut choisir d’y rester car elle est aussi confortable, cette position, parfois : elle nous amène à rester en retrait, et c’est très bien comme ça, on en a pleinement le droit. (Contrairement à ce que dit la récurrente injonction pas toujours très pertinente : Il faut sortir de sa zone de confort).
Mais souhaitant aider ici les timides comme moi qui aimeraient bien parfois l’être moins, cet article a plutôt pour modeste ambition de faire réfléchir à « comment se dégager de cette timidité en s’autorisant à changer ? « .
3) On parle souvent de « l’audace des timides »
Le timide audacieux, c’est celui/celle qui rougit en achetant une baguette de pain et qui « en même temps » un jour va oser dire ses quatre vérités à son chef devant 12 personnes ou monter sur les planches pour faire de l’improvisation théâtrale (ce que je recommande plus, quand même), ou enfin, qui va danser nu sur la table lors d’une soirée bien arrosée (car hélas bien souvent, en soirée, le timide boit. Un petit peu trop. Et ce n’est pas forcément à son avantage…)
Bref, réfléchissons à ces trois axes pour nous donner la fameuse « audace des timides » tout en l’atténuant un peu !
1# Pour le timide, les autres c’est l’enfer, mais c’est aussi le Graal
On est timide par rapport aux autres, parce que tout seul, ce serait bien ennuyeux.
Commençons par nous souvenir de ces proches qui nous intimidaient quand nous étions petits : notre père, notre grand-père, frère, tiens, tiens, souvent des figures masculines, mais aussi notre soeur qui a tellement mieux réussi que nous, notre mère autoritaire…
Si vous pensez être timide, comme moi, réfléchissez à ces figures proches qui vous intimident ou vous intimidaient, car ce sont les premières souvent qui vous ont enfermé.e.s dans le statut de « timide ».
Les proches qui nous intimident, nous intimident pourquoi ?
Nous avons le sentiment qu’ils nous jugent, ou qu’ils jugent nos actions, de n’être pas assez bien ou méritants à leurs yeux. Nous leur accordons une valeur souvent supérieure à la nôtre.
Je me positionne exprès ici en tant qu’enfant, car le timide adulte est souvent très proche de l’enfant qu’il fut, intimidé par l’oncle bougon, le grand-père taiseux, ou pire, le parent violent.
L’idée n’étant pas de faire de la psychologie de bazar, je veux juste mettre en avant le fait que ce qui nous rend timide, c’est bien la croyance que l’autre – quel qu’il soit – va nous juger.
Or, pour déconstruire cette idée, il suffit juste d’inverser les rôles et d’imaginer une personne timide qui vient nous parler : ce petit garçon apeuré parce qu’il a fait un bêtise, ce rendez-vous galant avec une personne rougissante, ou ce timide qui s’exprime avec une voix tremblottante devant une assemblée. Dans tous les cas, que se passe-t-il en nous face à cette situation : jugeons-nous mal cette personne ? Avons-nous un avis défavorable ou tranché sur ce qui fait sa valeur ? Ressentons-nous du mépris à son encontre ?
Dans la plupart des cas, nous ne nous rendons même pas compte que la personne est timide, mais :
– Si elle tremble devant une assemblée, nous nous disons que c’est normal qu’elle soit intimidée par le fait de parler devant une foule.
– Si elle vient nous voir en prenant sur elle et bégaye un peu, nous écoutons ce qu’elle a à nous dire et l’aidons à exprimer sa pensée, comme nous le ferions dans le cas d’un ami ou de notre enfant par exemple etc.
Par expérience : lorsqu’on rougit, les gens trouvent cela mignon, touchant, voire séduisant, cela active leur côté bienveillant. Lorsque la voix se fait chevrottante et que l’on a du mal à aligner deux mots, ils ont plutôt de l’empathie, ils nous laissent finir notre moment gênant et reviendront vers nous plus tard dans un autre contexte, à moins d’être des psychopathes ou manipulateurs pervers, (et ceux-là, leur jugement ne doit jamais nous impacter. Jamais.)
Enfin, la plupart du temps, l’autre aussi est ou se pense timide.
A part votre beau-frère qui a une porsche, qui parle très fort de ses vacances en Thaïlande et qui vous irrite ou le manager… que personne ne peut supporter ! Car à y regarder de plus près, se sentir timide, c’est normal, et le jugement de l’autre, c’est souvent juste une croyance.
Je dirais même plus : ceux qui nous intimident sont souvent eux-mêmes très timides. Ils le cachent en se renfrognant, en ne parlant pas, en adoptant une attitude un peu lointaine, voire fermée. Comme le grand-père bougon au final.
2# Etes-vous vraiment timide, aujourd’hui ?
Ce sujet de la timidité, ce n’est pas rien, cela peut devenir un vrai handicap social, et c’est dommage de s’y enfermer car au fil des années, nous changeons.
Contrairement à ce que chante Céline Dion (On ne chainge pôoo , allô ? Vraiment ?). Et contrairement à ce que vous disent peut-être votre famille, vos amis, votre petite voix intérieure.
La phrase « On est des timides dans la famille« , je l’ai vraiment entendue de quelqu’un qui a des tonnes de ressources en lui mais qui a du mal à sortir de la case Timide et donc ne nous fait hélas pas profiter de tous ses talents.
A cet homme qui ne lira jamais ces mots, je souhaite dire : » Il n’est pas trop tard pour changer, c’est-à-dire pour penser que 1) les gens ne te jugent pas à chaque fois que tu ouvres la bouche, que 2) ce que tu as à dire est riche et intéressant et que 3) même si ce que tu dis n’est pas intéressant, ce n’est pas si grave, on s’en fiche, et par ailleurs, les gens qui te connaissent t’aiment « .
Et nous, parents, arrêtons de dire de nos enfants qu’ils sont timides à la boulangère, à la maîtresse, à la famille, car si jamais ils ne l’étaient pas, ils vont le devenir.
La méthode Coué, ça marche dans les deux sens !
(JE SUIS TIMIDE JE SUIS TIMIDE JE SUIS TIMIDE JE SUIS SIMPLET JE SUIS TIMIDE…)
Pour revenir au thème de ce paragraphe, » On peut changer » , ma soeur – qui se reconnaîtra, faites un effort les soeurs, vous n’êtes que deux – bref, ma soeur m’a fait valoir un jour que je lui disais « j’en ai marre d’être aussi introvertie et timide« , que peut-être je le fus et que peut-être je ne l’étais plus tant que ça, à force de me forcer et de me lancer des défis.
Je m’étais inscrite à un atelier d’improvisation théâtrale il y a quelques années et lors du premier atelier, j’ai pleuré. J’étais adulte, à plus de 30 ans, incapable de faire l’exercice demandé.
Bon, j’ai continué quand même, et lors des ateliers suivants, je me suis sentie un peu à l’écart des autres qui étaient là pour s’amuser et « jouer », pas pour une thérapie.
Cette difficulté à montrer quelque chose de moi aux autres s’est estompée au fur et à mesure que j’ai compris que l’impro, c’etait jouer et rebondir avec ce que proposaient les autres, en comptant sur eux, pas un one-man show dans lequel j’aurais dû « performer ».
L’improvisation théâtrale en cela est vraiment l’alliée des timides, d’ailleurs beaucoup d’improvisateurs en sont au départ en réalité.
Dès que l’on se décentre de soi et de ses peurs – de l’idée que les gens nous jugent – pour être en empathie, en réaction, ou simplement curieux envers les autres, la timidité disparaît.
A ce sujet je ne saurais trop vous conseiller de lire l’article Nan mais moi, de toute façon, je ne sais jamais quoi dire en société.
Aujourd’hui, certains me voient toujours comme une personne « pas sûre d’elle-même », on me le dit régulièrement, mais je sais le chemin parcouru et je peux affirmer être mille fois moins timide qu’il y a dix ans. J’ai changé, peut-être pas au sens de Céline Dion, mais dans le sens où la timidité me freine beaucoup moins dans mes actions.
3# L’audace des timides : youpi ! Elle existe bel et bien !
Ah ah ! Et voici mon moment préféré ! Que celui qui ne voit pas de quoi je parle me lance la première pierre !
Cela n’arrive pas fréquemment, ça part d’on ne sait où mais quand cela arrive, c’est un bonheur pour tous. On ne reviendra pas sur le timide bourré, car bourré, ce n’est pas du jeu.
Mais oui, il s’agit bien de ce timide qui, poussé par je ne sais quelle force surnaturelle se lance dans un truc énorme, une déclaration d’amour passionnée à une personne qui ne SAIT PAS qu’il l’aime en secret depuis 3 ans, ou dans une une diatribe bien sentie lors d’un repas de famille : « Je vous déteste avec vos sarcasmes et vos petites mesquineries, je suis de gauche, je suis homo, le lapin dans la machine à laver c’était moi, allez tous vous faire … ».
Le gars ou la fille qui accepte un gage improbable lors d’un jeu « cap ou pas cap » et qui se retrouve déguisé en pingouin en plein centre-ville à chanter du Chantal Goya sans sourciller.
Oui cette autre personne, elle est bien là, tapie dans l’ombre du timide, et elle s’exprime soudain, trop et trop fort, à un moment incongru, là où personne ne l’attendait.
S’est-elle déjà exprimée chez vous ? Si oui, c’est tant mieux, car vous savez qu’il y a cet autre en vous, et cet autre a ce panache, cette fougue et cette exubérance qu’il vous manque la plupart du temps. Si non, je suis sûre que vous l’imaginez, ce moment, où, un jour « ça va sortir ».
Eh bien, ça, cet élan, cette audace cachée, c’est notre bien le plus précieux. Sauf qu’au lieu de partir dans les extrêmes, il suffit juste de s’autoriser la nuance. Ok, c’est moins amusant, mais c’est plus jouable dans la vie de tous les jours, et pour ça, il y a deux options en fonction du contexte, moins contradictoires qu’il n’y paraît au premier abord, et cumulables pour encore plus d’aisance dans la vie sociale :
- la préparation, sécurisante et qui porte forcément ses fruits. (Souvent on n’a juste pas envie de faire l’effort)
- l’improvisation, qui consiste non pas à se jeter dans le vide, mais à essayer de ne penser à rien d’autre qu’à l’autre, à s’oublier quelque part.
Un exemple concret : l’entretien d’embauche.
Si vous préparez bien, que vous répétez et que vous analysez tout ce qui peut l’être concernant le poste ou l’entreprise, vous vous sentez déjà moins stressé. C’est le point 1, la préparation. Le point 2, l’improvisation, c’est : on vous pose une question piège à laquelle vous n’avez pas songé, et au lieu de paniquer, vous restez calme, dites la vérité et rebondissez immédiatement : « Je ne sais pas. J’avoue que je n’y ai pas réfléchi, vous pouvez m’orienter sur la réponse attendue, ce que vous voulez vraiment savoir ? » Ou quelque chose du genre. Bref, poser des questions. Et ça c’est tout l’objet et le secret de Je ne sais jamais quoi dire en société, à lire d’urgence !